« Svalbard by night » impressions de deux navigateurs
La galerie Trace-Ecart présente les travaux du couple d’artistes navigateurs
Mélanie Repond et Benjamin Ruffieux. Les ambiances du Spitzberg se déclinent en
noir et blanc sur une vingtaine de gravures sur photographies.
Mélina Repond et Benjamin Ruffieux, Trace-Ecart, Bulle 2016
À bord de Knut, leur voilier
de vingt-cinq mètres, Mélanie Repond et Benjamin Ruffieux (respectivement graveuse
et photographe) on visité il y a quelques mois une partie du Svalbard au nord
de la Norvège. Communément nommé Spitzberg, cet archipel est un territoire
égaré entre abandon et source d’espoir. On le dit habité par plus d’ours blancs
que d’humains. Pour le couple de navigateurs, il est un trésor d’inspirations. Ils
découvrent le lieu ensemble et reviennent avec des images sur pellicule et
d’autres en tête, prêtes à émerger. À l’instar de Bernd et Illa Becher ou Christo
et Jeanne-Claude, Mélina et Benjamin travaillent leurs oeuvres à deux. Chacun au
travers du filtre de leur propre sensibilité, ils créent une image commune,
troublant le jeu de la réalité. Il décèle l’humain par les marques de son
absence tandis qu’elle insuffle ici et là les traces d’un passage animalier. Tous
deux sont à la recherche d’une présence, bestiale pour la graveuse, humaine
pour le photographe. « À vrai dire, je ne suis pas sûre qu’il y ait une
vraie différence » suggère Mélina Repond qui n’a pas pour habitude de classer
les choses dans des cases définies.
Sur le terrain lors des
prises de vue ou en atelier pour les dernières opérations, les deux compères
travaillent ensemble. « Il faut savoir lâcher prise, pour que naissent
l’idée commune » ajoute le navigateur. Ils choisissent les sujets,
définissent l’action qui pourrait s’y jouer, mettent en scène le leurre et
passent sous presse. Cette technique perfectionnée depuis 2010 demande encore
quelques ajustements mais offre de multiples possibilités que le binôme
explorera encore, tout comme le territoire arctique qu’il retrouvera
prochainement.
Deux visions
Cette fascinante approche
artistique laisse apparaître clairement deux visions. Elles s’entrechoquent ou
s’enlacent tissant un résultat qui repousse les limites habituelles des deux
procédés. Là-bas, deux bernaches s’envolent, quittent le cadre d’un ciel gris,
ailleurs un renard furète. L’intégration de la gravure est saisissante, la
trame de celle-ci se mêle au grain de la photo argentique. Ici, un iceberg
photogène trône à la surface d’une obscurité océanique où est gravée une sombre
silhouette. Le spectateur doit jouer avec la lumière ambiante pour y apercevoir
la réminiscence d’une banquise fondue depuis longtemps. L’illusion fonctionne
et dérange car elle marque plus encore le propos ; la disparition d’un
territoire de glace. Benjamin Ruffieux souligne:« Bien plus qu’une
recherche technique, notre but est de documenter cette région au travers de
notre propre approche artistique». Avec leur association Maré Motrice, ils
élargissent encore ce désir en accueillant sur le Knut d’autres artistes qui
complèteront cette documentation. Dans cette optique, le plasticien David
Brülhart qui a obtenu récemment la bourse de la mobilité du canton de Fribourg,
naviguera cet été avec la prochaine expédition. MR
Galerie
Trace-Ecart « Svalbard by night » à voir du 5 au 20 mars, jeudi,vendredi 14h-18h
samedi,dimanche et jours fériés 14h-17h http://www.traceecart.ch/